12e jour : Fengdu → Qutang → Les trois gorges
Publié le 07/10/2013 | 3584 vues
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Petit-déjeuner toujours aussi frugal. Les prévisions météo sont plus optimistes que la veille : temps nuageux seulement. Je constate avec soulagement que le verre de l'objectif de l'appareil photo n'est pas fendu comme nous l'avions craint. C'était juste une goutte, qui depuis a séché. Ouf ! J'ai quelques bleus de ma chute de la veille, mais rien de grave.
Les passagers chinois partent pour l'excursion optionnelle du Château de l'Empereur Blanc à Baidi City (白帝城 Bái dì chéng). D'après la documentation en anglais disponible à l'accueil, ce site est située 8 km à l'Est du siège du district actuel de Fengjie, à l'entrée de la gorge Qutang. Il rassemble plusieurs sites historiques (temples et portes) se rapportant à la période des Trois Royaumes. On en atteint le sommet après une montée de 500 marches. LiPo, un grand poète contemporain de la dynastie des Tang, a écrit un poème très célèbre au sujet de cette ville.
C'est dans cette ville que Liu Bei, chef du Royaume de Shu, se réfugia suite à sa grande défaite à la Bataille de Yiling. En 220 il confia le pouvoir et son fils à son Premier ministre et conseiller Zhuge Liang. Des statues de cire dans le temple commémorent cet épisode. Liu Bei mourut peu de temps après, en l'an 223.
Un observatoire érigé à l'Ouest du Temple de Baidi repose sur 12 piliers au rez-de-chaussée et 6 au niveau supérieur, avec des corniches reversées et des poutres raffinées. On raconte que Zhuge Liang s'y installer pour admirer les étoiles et prendre des décisions stratégiques.
La ville de l'Empereur Blanc est également connue sous le nom de ville des poèmes : elle abrite plus de 70 poèmes, sculptures et reliques culturelles datant des dynasties Sui, Yuan, Ming et Qing. Parmi elles, les deux stèles de l'Empereur Kangxi, la stèle de la feuille de bambou et la stèle du phénix sont les plus remarquables. Sur la stèle des phénix, on retrouve le roi des oiseaux, la pivoine (la reine des fleurs), et un arbre parasol chinois (le roi des arbres). C'est pourquoi elle est également désignées osus le nom de stèle des trois rois. La tablette de la feuille de bambou s'appelle ainsi car elle est gravée d'un poème dont les les caractères sont faits en forme de feuilles de bambou (des photos de ces tablettes se trouvent sur ce site).
La ville de l'Empereur Blanc est entourée par le fleuve sur trois de ses côtés et adossée à une montagne. Là, se trouve une statue de fillette sichuanaise assise sur le dos d'un taureau, chantant des chansons de bambou, des chansons populaires chez les natifs des Trois Gorges. On dit que la ville de l'Empereur Blanc a été fondée par Gongsun Shu en 25 après J.-C., pendant la dynastie Han orientale, après qu'il ait vu un dragon blanc s'élever au-dessus d'un puit, et qu'il se soit auto-proclamé Empereur blanc. Dans la culture chinoise, le dragon était souvent considéré comme le symbole de l'Empereur. Cette ville a inspiré de nombreux poètes, anciens ou contemporains.
La ville de l'Empereur Blanc est également un centre rassemblant des reliques d'intérêt historique, des tablettes en pierre datant des dynasites Sui, Yuan, Ming et Qing, gravées de poèmes, essais, couplets antithétiques (?), d'images et de calligraphies. Dans la calligraphie des inscriptions portées par les tablettes, on retrouve des petits et des grands idéogrammes de sceau, des inscirptions officielles de la dynastie des Han et des Wei, des caractères réguliers, script ou cursive, chacun présentant ses propres caractéristiques. L'inscription la plus estimable figure sur la Tablette du Mémorial au seigneur Longshan, exécutée dans une calligraphie pleine de force qui combine les styles des calligraphes du Nord et du Sud. Elle date d'environ 1300-1400 ans. Elle a été exhumée en 1859 durant la 9e année du reigne de Xianfeng (dynastie Qing) durant la construction d'un fort dans la partie Nord-Ouest de la ville de Fengjie. Dans le coin supérieur de cette même tablette, on trouve des mots plus récemment gravés : "La crue a causé un sinistre, l'eau s'élevant 50 pieds plus haut que la ville le 19e jour du 6e mois de la 9e année du reigne de Tongzhi". C'est un témoignage fiable de la célèbre crue du Yangtze en 1870, et une pièce rare de l'histoire de l'hydrologie.
A 9h00, j'assiste à une conférence de Libby sur la rivière Yangtse sur le pont 5.
Ensuite, initiation au Mah-Jong. Je joue contre trois Américains (dont un qui y joue régulièrement). L'un d'entre eux, d'origine chinoise, lance en rigolant : "On a envoyé 4 Chinois sur la lune. Pendant qu'ils sont là haut, au moins ils ne jouent pas au mah-jong !"
Bon, j'ai perdu...
Passage de la gorge Qutang
Nous repassons à notre chambre, le linge n'est toujours pas sec ! Nous ressortons le sèche-cheveux. Histoire de me libérer les mains, je le pose, calé sur la zapette pour le diriger vers le haut, et le laisse fonctionner quelques minutes.
Déjeuner buffet, tandis que nous croisons au large de la ville de Wushan (590 000 habitants en 2004).
Nous jetons un œil aux photos prises la veille par le photographe du navire et aux prix des tirages (un peu cher, mais ça les vaut, sachant que les photos sont plastifiées).
Passage de la gorge Wu
Promenade sur la rivière Shennong
Quand nous revenons à notre chambre, nous trouvons un petit chocolat (de marque Le Conté, en Français dans le texte !) posé sur chacun de nos lits, ainsi que le programme du lendemain, et un questionnaire de satisfaction.
Le dîner d'adieu du capitaine est servi à table, avec toast de l'équipage.
Puis petit briefing pour savoir comment on s'organise demain matin : réveil à 6h00, petit-déj, les valises doivent être prêtes pour 7h00, départ à 7h30 pour la visite du chantier du grand barrage. Si le Century Sun a pu passer l'écluse du grand barrage pendant la nuit (ce n'est pas certain, car la veille, les bateaux ont été bloqués à cause du brouillard), nous laisserons nos sacs dans la chambre et on retournera les chercher au bateau vers 10h30 pour un départ à 11h00. Sinon, nous emmènerons nos sacs avec nous dans le bus pour le chantier du grand barrage.
Une de nos compagnes de voyage, qui fait le circuit seule, et a une cabine pour elle toute seule (mais retrouve quand même une paire de bouteille chaque jour), nous propose gentiment ses bouteilles d'eau pour nous dépanner.
Demain matin tôt, nous passerons la gorge de Xiling
Un documentaire de Discovery Channel en anglais sous-titré en chinois sur la construction du grand barrage, avec commentaire de Jodie Foster, est diffusé à 20h45. Le propos est assez critique pour le projet de barrage, il insiste particulièrement sur les dégâts sur le plan social et humain. Des trésors archéologiques et historiques seront perdus. Des simulations de niveau d'eau en 3D sur des photos de paysages actuels montrent l'étendue de ce qui va être englouti lorsque le barrage sera terminé. On apprend qu'un village, plutôt que de se retrouver relocalisé n'importe où et se voir attribuer des terres incultivables dans un climat défavorable, ont préféré prendre eux-mêmes les choses en main : ils reconstruisent eux-mêmes leur village plus haut. Le documentaire évoque également les risques potentiels : rupture du barrage, gestion des limons, et tremblements de terre. En conclusion, la Chine va devoir choisir quelle part de son passé elle souhaite emmener avec elle dans le prochain siècle.
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Vers 22h00, on nous annonce à la radio que le navire a l'autorisation de passer le barrage. A chacune des 5 écluses, nous allons perdre 18 à 20m.
Vers 22h30, le navire s'arrête. Nous sommes en vue de la 1e écluse. Nous récupérons les batteries des appareils photos que nous avions mis en charge, afin d'immortaliser l'instant.
Des bateaux doublent le nôtre. Le Century Sun se remet en marche, arrive devant la première écluse, s'arrête à nouveau. Nous voyons la porte se refermer devant nous. Nous ne ferons pas partie de ce premier chargement. Frustrant ! A gauche, des bateaux sortent de l'écluse qui permet de remonter le fleuve.
Vers 23h30, c'est à notre tour d'entrer dans l'écluse.
Un plus petit bateau de croisière se positionne à notre gacuhe, suivi d'une barge contenant un engin d'excavation gigantesque et son gravier. A eux deux, ils font la même longueur que nous. Reste encore la place pour un 3e et un 4e derrière. Les navires sont amarrés à des bittes au niveau des parois de l'écluse. Je me recouche.
Un quart d'heure environ s'écoule encore, on entend des grincements, je me relève : la porte d'admission a été refermée, et le niveau commence doucement à baisser. Il est temps de se coucher pour de bon.